L’importance de la prévention

 

« Prévenir les autres comportements à risques peut avoir des effets positifs sur la prévention des dépendances »

La session spéciale de l’Assemblée générale des Nations Unies sur le problème de la drogue dans le monde, baptisée UNGASS 2016, approche rapidement et Dianova veut apporter son éclairage sur certaines questions que nous jugeons particulièrement importantes, non seulement parce qu’elles constituent le fondement de notre travail quotidien mais aussi parce qu’elles sont cruciales pour l’efficacité des politiques anti-drogue.

Dans le présent article, nous voulons insister sur la pertinence de la prévention dans la toxicomanie. Nous avons emprunté un texte du rapport « L’avenir de la politique anti-drogue : de vraies solutions fondées sur les preuves mondiales», initialement publié en novembre 2015 par Drug Policy Futures, une plate-forme globale qui réclame des stratégies basées sur les preuves pour la promotion de la santé, de la sécurité et du bien-être de la société, y compris des toxicomanes et de leurs proches.

Dans ce rapport, Drug Policy Futures a choisi de combiner arguments théoriques sur la politique anti-drogue et approches pratiques au niveau local pour décrire comment lutter contre la drogue dans la pratique.

Télécharger le rapport complet (PDF en anglais)

L’importance de la prévention : introduction

Par Charli Eriksson, professeur à l’École des sciences de la santé, Faculté de médecine et d’hygiène, Université d’Örebro, Suède

Il vaut toujours mieux prévenir un problème de santé que le traiter. C’est un sujet largement rebattu. De fait, une recherche dans une base de données récemment actualisée a donné près d’un million de résultats pour « prévention ». Quand on veut discuter de l’importance de la prévention en matière de dépendances aux substances, il faut, pour commencer, définir ce que signifient les mots « importance » et « prévention » dans le contexte d’une future politique anti-drogue.

Si cette politique s’inscrit dans une approche de santé publique, l’un de ses buts essentiels sera d’empêcher les problèmes liés à la drogue. Il s’agit là d’un aspect important de la promotion de la santé au 21ème siècle, d’une entreprise multidisciplinaire qui va de la surveillance à la fourniture de conseils et d’informations sur la santé. Cette approche inclut les actions d’individus intervenant par le biais d’organismes nationaux et internationaux. Elle se déroule dans de nombreux cadres différents : à la maison, au travail, à l’école, dans les maisons des jeunes, les centres de santé, les restaurants et autres lieux où les gens se retrouvent.

L’importance de la prévention, dans le contexte de la lutte contre les drogues, dépend de la prévalence de l’utilisation et de l’abus de substances dans la population et de leur impact sur la santé et le bien-être de la population. L’ampleur indéniable du problème et son coût social et économique colossal imposent aux décideurs politiques, à tous les niveaux, de lui apporter une réponse prioritaire.

Les réalités économiques de la santé décrites ailleurs dans cet ouvrage montrent clairement que les pouvoirs publics doivent s’impliquer dans la prévention des addictions. Cela dit, cette prévention a besoin d’armes efficaces pour toucher ses cibles. Il n’est pas question d’une seule toxicomanie. Et on n’éliminera pas la toxicomanie avec une seule balle bien placée. Les bonnes intentions ne suffisent pas. Il faut bien percevoir le potentiel de la prévention de la toxicomanie.


On croit souvent, notamment quand on n’est pas « de la partie », que la prévention se limite à avertir les jeunes des dangers de la drogue. Pourtant, l’information sur les effets de la drogue, principalement dans les médias, n’a aucun effet sur les comportements si elle est employée seule, d’après de récentes études. La science nous dit que l’histoire est plus compliquée que ça (…).


La prévention, c’est vouloir que les enfants et les adolescents grandissent en bonne santé et à l’abri du danger. Les stratégies de prévention basées sur les preuves scientifiques, faisant participer les familles, les écoles et les communautés, peuvent assurer que les enfants et aux jeunes, y compris les plus marginalisés et les plus pauvres, grandiront et resteront en bonne santé et en sécurité jusqu’à l’âge adulte.

La prévention des dépendances fait partie intégrante d’un effort plus large visant à rendre les jeunes moins vulnérables et plus résilients. En s’attaquant aux difficultés précoces plutôt qu’aux problèmes de consommation à l’adolescence, ces interventions réduisent les effets nocifs des substances sur le cerveau en développement.

Investir dans la prévention peut aussi être une source d’économies. Selon une étude américaine, chaque dollar investi dans la prévention peut rapporter au moins dix dollars en réductions sur les coûts sanitaires et sociaux et la délinquance.

Une estimation du poids mondial des maladies a montré que 12,6 % des décès et 9 % des années de vie ajustées en fonction du handicap (DALY) perdues étaient la conséquence de la toxicomanie. Les chiffres se sont avérés plus élevés dans les pays à forts revenus où 10,2 % des DALY perdues étaient attribuées au tabac, 6,7 % à l’alcool et 2,1 % à la drogue. Cela dit, la chute des individus dans la dépendance, la toxicomanie et une mort précoce sont des pertes supplémentaires pour leur famille, leur réseau social et leur travail.

Dans les faits, le véritable défi de la prévention des addictions, c’est d’aider les jeunes à ajuster leurs comportements, leurs capacités et leur bien-être dans des domaines d’influences multiples : normes sociales, interactions entre pairs, conditions de vie, personnalité individuelle. En outre, la dépendance aux substances a plusieurs vulnérabilités en commun avec d’autres comportements à risque. De ce fait, prévenir les autres comportements à risque peut avoir des effets positifs sur la prévention. Une politique anti-drogue peut aussi rendre plus facile la vie sans drogue si elle réduit l’exposition aux substances en cause. Cette position se retrouve dans les approches récentes de la prévention, dont le but est aussi de réduire le risque lié aux abus de substances. C’est dans ces approches que résident les meilleures chances de succès dans la prévention des addictions.

Traduit de l’anglais par Translators Without Borders. Un grand merci!