Changement climatique, COVID et santé mentale

« Pollution de l’air, pollution de l’esprit : un regard sur la crise climatique et la santé mentale à l’heure du COVID », un webinaire de l’ONG CSW/NY

Climate change

Various studies show that “ecoanxiety” or “climate anxiety” also impact people’s ability to function day-to-day (eating, concentrating, having fun, sleeping, maintaining relationships) in 45% of cases – illustration: Shutterstock

Par Maria Victoria Espada – Jusqu’à récemment, le changement climatique, le COVID-19 et la santé mentale étaient des thèmes divers, sans rapport entre eux. Cependant, leur conjugaison au cours des deux dernières années nous amène à penser le contraire. Si les études sur le lien éventuel entre le changement climatique et le COVID ne sont pas encore concluantes, les conséquences de ces deux phénomènes sur la santé mentale ne font, elles, aucun doute.

Afin de mieux comprendre les interaction entre ces problématiques et sensibiliser le grand public, le Comité d’ONG sur le statut de la femme de New York (NGO CSW/NY), dont Dianova International est membre, organisait en janvier dernier un webinaire sur le thème « Pollution de l’air, pollution de l’esprit : un regard sur la crise climatique et la santé mentale à l’heure du COVID ».

L’impact du changement climatique sur la santé

Le changement climatique entraîne des modifications de la fréquence et de la gravité des événements extrêmes (pluies torrentielles, incendies, sécheresses, augmentation des températures et du niveau des mers, entre autres) qui affectent la santé physique et mentale des personnes. Ses conséquences se font également sentir sur la santé de la société elle-même, étant donné que « la santé physique, la santé mentale et la santé communautaire sont liées et dépendent des vulnérabilités aux plans physique, individuel et social », comme l’a fait remarquer la Dre. Susan Clayton, professeuse de psychologie au Collège de Wooster. Il n’est donc pas surprenant que les maladies physiques et les troubles mentaux au niveau individuel menacent la cohésion des communautés en augmentant les agressions, les inégalités et l’instabilité sociale.

Des études indiquent que l’éco-anxiété ou anxiété climatique a également un impact sur le fonctionnement quotidien des personnes (manger, se concentrer, s’amuser, dormir, socialiser) chez 45 % des personnes.

Selon la Dre. Clayton, « les femmes font partie des groupes les plus vulnérables et sont les plus exposées à l’anxiété climatique et à d’autres troubles de santé mentale ».

Cette anxiété, qui résulte du lien entre les préoccupations environnementales et les troubles psychologiques, n’est pas non plus différenciée en fonction de l’âge : les enquêtes montrent que 8 enfants et jeunes sur 10 sont inquiets des menaces que le changement climatique fait peser sur l’être humain et sur les écosystèmes.

La pandémie accroît les troubles de santé mentale

La pandémie et les mesures prises pour l’endiguer ont également eu un impact considérable sur la santé mentale. Des niveaux accrus de détresse, d’angoisse, d’anxiété, d’insomnie, de distorsion de la réalité et de comportements à risque ont été signalés, ainsi qu’une augmentation de la consommation d’alcool et de drogues et de la dépendance à Internet. Pour Donattela Marazziti, doctoresse en psychiatrie de l’université de Pise, « la peur et la méfiance ont été accrues par l’infodémie« , aggravant encore les effets de la pandémie sur la santé physique et mentale des personnes.

En attendant des données concluantes, les premières études suggèrent un lien entre les modifications des conditions de température et d’humidité associées au changement climatique et la pandémie de COVID-19. Il est donc nécessaire de prendre conscience de l’interdépendance des facteurs biotiques (le vivant) et abiotiques (la lumière, l’eau ou l’oxygène) et d’agir maintenant pour prévenir d’éventuelles crises climatiques et sanitaires futures. « Sans santé planétaire, il n’y a pas de santé mentale », comme l’a fermement souligné le Dr Marazziti.

effet multiplicateur

Le changement climatique, la pandémie de COVID-19 et les problèmes de santé mentale se renforcent mutuellement et ont un effet multiplicateur sur les risques pour la santé et le bien-être – Illustration: Shutterstock

Un effet multiplicateur

Dans le même ordre d’idées, le Dr Eleanor Nwadinobi, présidente de la Medical Women’s International Association, a affirmé que le changement climatique, la pandémie de COVID-19 et les problèmes de santé mentale « se renforcent mutuellement et ont un effet multiplicateur sur les risques pour la santé et le bien-être ». Paradoxalement, si les habitants des pays à faible revenu contribuent le moins au changement climatique, ce sont ceux qui en souffrent le plus. Et, parmi les plus vulnérables on retrouve bien sûr les femmes et les enfants, les personnes vivant avec un handicap, ainsi que les migrants, les personnes déplacées en raison des conflits armés et les personnes vivant dans la pauvreté.

 

Sans surprise, les mesures de confinement ont également eu un impact plus important sur les femmes et les filles. On constate une augmentation significative des mariages d’enfants, des mutilations génitales et des violences entre partenaires intimes, avec des effets dévastateurs sur la santé mentale des personnes concernées.

Penser autrement pour agir autrement

Pour Parmita Sarma, cofondatrice de la fondation Akshar, l’éducation représente une partie de la solution à ces problèmes. Fruit d’un projet novateur, une école située dans les bidonvilles de Guwahati, dans l’État d’Assam en Inde, s’est transformée aussi en centre de développement durable. Les élèves, dont la plupart sont issus de familles pauvres, paient leurs frais de scolarité avec des déchets plastiques, qui sont ensuite transformés en « briques écologiques » destinées à divers usages. « Rien n’aura un impact plus durable sur les générations futures que l’éducation. Il faut penser différemment pour agir différemment », soulignait Parmita.

Préparer un avenir durable

Interrogés sur les stratégies à suivre pour traverser cette période difficile et préparer un avenir durable, les panélistes se sont accordées sur la nécessité de maintenir des espaces de débat tels que celui-ci, de mettre en place des partenariats entre des personnes et des organisations dont les préoccupations et les motivations sont similaires, et de soutenir des projets locaux dont le succès peut être reproduit à plus grande échelle.

Smog in the Air and in Your Mind: A Look at the Climate Crisis & Mental Health in a Time of COVID