Stigmatisation, usage de drogue et approche intersectionnelle

La formation du Groupe Pompidou visait à explorer les racines de la stigmatisation de l’usage de substances et à trouver des stratégies pour y remédier

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La stigmatisation est un problème de santé publique: elle contribue aux taux élevés de décès, d’incarcération et de problèmes de santé mentale chez les personnes aux prises avec une dépendance. – image: Shutterstock

Le Groupe Pompidou organisait une formation pour cadres dans le but d’explorer les racines de la stigmatisation associée à l’usage de substances et rechercher des stratégies communes pour y faire face, dans le cadre d’une approche fondée sur les droits et la santé publique.

Par la Dr. Gisela Hansen – Dianova a eu l’honneur de participer à la formation des cadres du Groupe Pompidou 2021 divisée en deux modules. Le premier module a eu lieu à Malte du 6 au 9 juillet 2021 et le second en Croatie du 5 au 8 octobre.

Le Groupe Pompidou est un organisme intergouvernemental créé en 1971 qui défend les valeurs fondamentales du Conseil de l’Europe (droits humains, démocratie et État de droit) et promeut une approche équitable dans la lutte contre l’usage et le trafic de drogues, en soutenant à la fois la réduction de la demande et celle de l’offre. Il s’agit d’un organe important dans le domaine de la politique en matière de drogues.

Formation 2021 et participants

Cette année, la formation des cadres entendait mettre en évidence la stigmatisation des personnes qui consomment des drogues afin de rechercher des stratégies de plaidoyer coordonnées entre les différentes parties prenantes. Vingt personnes venues de différents pays européens ont participé à la formation. Elles avaient été sélectionnées par le Groupe Pompidou en fonction de leur implication dans les questions de stigmatisation et d’usage de drogues et représentaient diverses institutions et organisations gouvernementales chargées de développer ou de mettre en œuvre des politiques en matière de drogues, ou encore de coordonner des programmes connexes. Etaient également présents des activistes, des chercheurs et chercheuses d’instituts nationaux et des représentant·e·s d’organisations de la société civile travaillant dans ce domaine, comme pour Dianova.

Rechercher de stratégies de lutte contre la stigmatisation

Lors du second module de formation, ont été présentés différents types d’actions et de pratiques susceptibles d’atténuer les effets négatifs et les conséquences de la stigmatisation. Le séminaire a exploré les possibilités et les limites des approches réglementaires, tout en examinant les bonnes pratiques visant à réduire la stigmatisation associée aux dépendances mises en œuvre dans différents pays, ainsi que les obstacles rencontrés.  Enfin, les conséquences de la stigmatisation sur les personnes qui consomment des drogues, les familles, les équipes professionnelles et la société en général ont été analysées.

Un programme innovant et complet qui couvre les différents aspects du phénomène de la stigmatisation.

Atténuer l’impact de la stigmatisation

L’approche choisie et les présentations ont toutes été d’excellente qualité. La formation a débuté avec Elena Hedoux, Catherine Du Bernard, Tomhas Kattau et Ian Wilson (Groupe Pompidou) qui ont passé en revue le premier module et fourni des exemples pratiques sur la façon d’atténuer les conséquences de la stigmatisation. Les autres sessions étaient composées de l’intervention du Dr. Mauro Guarineri, qui a relaté son expérience en tant que coordinateur de l’INPUD, celle de René Stamm (Office fédéral de la santé publique suisse) sur l’approche de la stigmatisation à partir des réseaux de santé publique et de traitement des addictions. La professeure Maureen Williams (Royaume Uni) a ensuite expliqué les fondements de l’approche intersectionnelle et comment les différents axes de vulnérabilité et de privilège doivent être pris en compte dans l’approche des addictions, comme de toute situation complexe, pour un accompagnement intégral.

Protéger les droits de l’enfant

Un élément aussi innovant qu’indispensable a été le fait d’associer certaines thématiques au problème de la stigmatisation, soit celles des enfants et des personnes LGTBQ+. Antti Jaerventaus (Save the Children, Finlande) a fait part de sa vision en matière des droits de l’enfant dans le domaine des addictions. Il a souligné combien l’intervention était généralement orientée sur les adultes et non pas vers un cadre systémique protégeant les droits de l’enfant (voir à ce propos le rapport de Dianova sur la perspective des droits de l’enfant dans les services d’addictions).Enfin, Ricardo Fuertes (municipalité de Lisbonne) a présenté l’expérience portugaise avec la création de services de traitement de réduction des risques orientés vers l’intégration de la population LGTBQ+, l’accès à la santé, au logement et aux droits sociaux.

Visite d’une communauté thérapeutique

Une journée de formation a été consacrée à une visite de la communauté thérapeutique de Zajednica Pape Ivana XXIII (Bosnie), avec une présentation du programme de traitement, de son fonctionnement et des activités mises en œuvre avec la communauté. Plusieurs usagers ont également témoigné de leur expérience.

 

Les processus de stigmatisation sont des mécanismes de fonctionnement social et personne n’y échappe. Les professionnels des services de lutte contre les dépendances peuvent, consciemment ou non, répéter ces schémas sociaux dans leur travail quotidien, que ce soit au niveau de la conception des programmes ou dans leur mise en œuvre. C’est pourquoi la formation, l’examen et le dialogue sur cette question sont essentiels pour détecter les obstacles sociaux, tant au plan du système que de l’individu, afin de parvenir à un accompagnement intégral et non moralisant des personnes aux prises avec une dépendance ou un usage problématique de drogues.

Participants

Quelques-uns des participants à la formation exécutive du Groupe Pompidou en Croatie

Dianova et la formation des cadres du Groupe Pompidou

Dianova a eu la chance de participer aux formations exécutives du Groupe Pompidou sur « Formation pour une coopération efficace : interactions entre les gouvernements et la société civile » (2016) et « Intégrer les questions relatives au genre dans la politique des drogues et la prestation de services » (2019). Ces formations sont caractérisées par des formateurs de haut niveau, orientées vers la participation et la pratique, sous l’égide attentif du Groupe Pompidou.

Formation en ligne

Dianova souhaite réitérer ses remerciements à la Division des Affaires Internationales de l’Office Fédéral de la Santé Publique Suisse pour avoir présenté et soutenu la candidature de Dianova, ainsi qu’au soutien financier du Groupe Pompidou pour la participation du Dr. Gisela Hansen. La participation à ce type d’espace est essentielle pour partager et apprendre des différents acteurs impliqués.

Suite à cette participation, Dianova souhaite mettre en œuvre une formation en ligne avec divers spécialistes de la stigmatisation et des dépendances. Notre objectif est d’avancer ensemble vers le changement social, la justice et l’égalité des chances.