Stigmatisation : « Nous sommes des gens, un point c’est tout »

Dianova souhaite mettre fin au rejet et à la stigmatisation dont souffrent les personnes qui font face à des troubles liés à l’abus d’alcool ou d’autres drogues

Centres Dianova Espagne

Les centres de Dianova Espagne permettent aux usagers d’apprendre à vivre sans drogues sans subir le fardeau de la stigmatisation – photo: Dianova CC

Par Alejandro Bassos Reina – Le sociologue Erving Goffman définit la stigmatisation comme une étiquette négative que l’on met à une personne pour la juger et la discriminer. Pour les personnes souffrant de problèmes de dépendance aux substances, cette stigmatisation fait partie du quotidien. Elles n’existent plus en tant que personnes et deviennent seulement des « junkies », des « toxicos » ou des « drogués » et subissent les insultes et le mépris de leur entourage.

Certaines des personnes qui fréquentent les centres de Dianova en Espagne ont l’habitude d’affronter cette situation quasiment tous les jours. À l’occasion de la Journée internationale contre l’abus et le trafic illicite de drogues, elles se sont exprimées et ont lancé un message : « La stigmatisation blesse et vous tire vers le bas. Nous sommes des personnes, un point c’est tout. »

Alberto a 44 ans et affirme que « tout le monde met des étiquettes. Si vous consommez des drogues, l’étiquette est négative et vous remarquez que vos proches s’éloignent de vous. » Si vous avez déjà un problème de dépendance, « cela ne fait que l’aggraver car si vous êtes, comme dans mon cas, une personne qui a besoin d’être valorisée par son entourage, sentir ce rejet vous fait sombrer. Sur le plan social, vous avez l’impression d’être au bout du rouleau. »

Luisa, 51 ans, a vécu cette stigmatisation lorsqu’elle a perdu son travail et qu’elle a remarqué qu’une partie de sa famille l’évitait. « J’ai eu la chance d’être soutenue par mes trois fils dans mon combat contre les dépendances, mais tout le monde n’a pas cette chance. Et cela fait mal de voir ceux que vous aimez le plus vous tourner le dos », a-t-elle expliqué.

Toute l’aide possible

La stigmatisation est particulièrement difficile à supporter lorsqu’elle est le fait des proches – une situation vécue par tous : « Si vous êtes en plus porteur du VIH, la stigmatisation est pire encore. Chez moi j’entendais de tout à mon sujet, et même venant de mon propre père », raconte Francisco qui a pris conscience de ce rejet à 46 ans après avoir été évincé d’entretiens professionnels du fait de sa séropositivité.

« On finit par croire qu’on en porte les stigmates sur le visage », poursuit Alberto. « On vit dans la peur, on se méfie de tout le monde parce qu’on se dit que même s’ils nous soutiennent maintenant, ils finiront tôt ou tard par nous tourner le dos. » C’est un sentiment que Jean, 53 ans, a également perçu, c’est pourquoi tout ce qu’il demande c’est un peu de compréhension : « une personne dépendante est une personne malade qui a besoin de toute l’aide possible ».  Pour tous ceux qui le rejettent et le stigmatisent, Jean n’a qu’un seul message : « Ils doivent observer et réfléchir avant de rejeter ; ils doivent comprendre d’où vient le problème et surtout écouter les gens et leur parler ».