Le rapport européen sur les drogues 2023 analyse la situation des drogues en Europe et présente les défis complexes associés aux drogues

Entre autres données, le rapport brosse un portrait global de la situation des drogues en Europe jusqu’en 2023 et fait une analyse détaillée (prévalence de l’usage, saisies, prix, demande de traitement, dommages associés, etc.) des substances illégales les plus couramment consommées en Europe – image: Shutterstock
L’agence européenne des drogues, l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT) compile et analyse chaque année les données envoyées par les Etats membres de l’UE, la Turquie et la Norvège pour produire le rapport européen sur les drogues. Cet article présente quelques extraits du rapport qui nous semblent particulièrement pertinents pour le travail de Dianova. Le rapport complet peut être consulté ici.
L’un des messages clés du rapport est que l’impact de la consommation de drogues illégales est aujourd’hui perceptible presque partout dans notre société. Presque tout ce qui a des propriétés psychoactives peut être utilisé comme drogue. Cela signifie que tout le monde, directement ou indirectement, peut être affecté par la consommation de drogues illégales et les problèmes qui y sont associés.
Extraits du rapport de l’OEDT:
Partout
Aujourd’hui, les incidences de l’usage des drogues sont observables presque partout. Au niveau national, elles se manifestent et exacerbent d’autres problèmes politiques complexes, tels que le sans-abrisme, la gestion des troubles psychiatriques et la criminalité juvénile. On observe également dans certains pays une montée des violences et de la corruption liées au marché de la drogue. À l’échelle internationale, les problèmes de drogues se multiplient dans de nombreux pays à faibles ou moyens revenus, ce qui nuit à la gouvernance et au développement et accentue les défis déjà considérables en matière de santé et de sécurité publique auxquels ces pays sont confrontés.
Tout
De plus en plus, nous observons que presque toute substance avec des propriétés psychoactives peut apparaître sur le marché des drogues, souvent sous une appellation trompeuse ou dans des mélanges, de sorte que les usagers peuvent ne pas savoir ce qu’ils consomment, augmentant ainsi les risques sanitaires et créant de nouveaux défis en matière de répression et de réglementation.
Tous
L’incidence des évolutions que nous constatons signifie que tout le monde est susceptible d’être touché d’une manière ou d’une autre par l’usage de drogues illicites, l’organisation du marché des drogues et les problèmes qui y sont associés. Nous l’apercevons de manière directe au sein des usagers nécessitant une prise en charge sanitaire ou un traitement. Indirectement, nous le voyons à travers l’enrôlement de jeunes en situation de vulnérabilité dans des réseaux de criminalités, la pression sur les budgets de santé et les coûts sociaux pour les communautés qui ne se sentent pas en sécurité ou à travers lesquelles les institutions ou les entreprises sont minées par la corruption ou des pratiques criminelles.
La situation en matière de drogues en Europe en 2023 — vue d’ensemble

Le rapport européen sur les drogues 2023 : Tendances et évolutions présente la dernière analyse de l’OEDT sur la situation des drogues en Europe. Axé sur la consommation de drogues illégales, les dommages qui y sont liés et l’offre de drogues, le rapport contient un ensemble complet de données nationales sur ces thèmes et sur les principales interventions de réduction des risques – Image : Capture d’écran du site web de l’OEDT
Une plus grande diversité quant à la disponibilité et la consommation de drogues crée de nouveaux défis en matière de santé et de politique
La disponibilité élevée des drogues s’est accompagnée d’une plus grande diversité des substances présentes sur le marché des drogues illicites, exposant les consommateurs à un éventail plus large de substances psychoactives. Il s’agit notamment des nouveaux produits de synthèse (NPS), pour lesquelles les connaissances sur les risques pour la santé sont souvent limitées. Cela suscite des inquiétudes quant à la possibilité d’une plus grande consommation de substances illicites en général et aux risques accrus associés à certaines d’entre elles. Les personnes qui consomment des drogues peuvent être exposées à un risque plus grand d’effets néfastes sur la santé, dont des intoxications et des décès. Elles consomment, peut-être à leur insu, des substances à teneur plus élevée en principe actif, des substances nouvelles ou des mélanges dont les interactions peuvent accroître les problèmes sanitaires.
Les réponses fondées sur des données scientifiquement validées et coordonnées peuvent fonctionner, mais sont souvent peu disponibles
Bien qu’il subsiste des lacunes importantes en matière de connaissances, la recherche et l’investissement dans le développement de la prise en charge signifient que, dans les domaines de la prévention de l’addiction, des soins, de la réduction des risques et des dommages et du soutien à la guérison, nous avons désormais une meilleure compréhension des actions susceptibles d’être efficaces. En outre, les problèmes liés à la consommation de drogues et d’autres questions complexes en matière de politique sociale étant interdépendants, il y a une prise de conscience plus large de la nécessité d’apporter des réponses plus intégrées et globales. Des synergies sont donc nécessaires avec les politiques et les pratiques dans d’autres domaines, comme les services d’aide au logement, les services génériques de santé, les services destinés aux jeunes et aux personnes âgées, l’offre de santé mentale et le système de justice pénale. Toutefois, la disponibilité de réponses spécifiques par type de drogue, d’une part, et les exemples de modèles de soins bien développés et intégrés, d’autre part, sont extrêmement hétérogènes au niveau européen. Dans de nombreux pays, il est nécessaire d’investir davantage dans ces deux domaines.
Plus de soutien pour la mise en œuvre d’une prévention de la consommation de substances fondée sur des données scientifiquement validées
La prévention autour de la consommation vise à empêcher l’usage de substances psychoactives ou à retarder cet usage. Elle peut également aider les personnes qui ont commencé à consommer des substances à éviter de développer des troubles causés par cet usage. Cependant, historiquement, toutes les approches utilisées dans ce domaine ne se sont pas révélées efficaces, et l’intérêt pour l’identification et la mise en œuvre de programmes de prévention s’appuyant sur des données scientifiquement validées s’est accrue. La réalisation de cet objectif est désormais soutenue par la mise en place de registres de programmes de prévention, d’initiatives de formation et l’élaboration de normes de qualité. Le Programme européen de formation en matière de prévention (European Prevention Curriculum) est conçu pour améliorer l’efficacité globale des efforts de prévention. Plus de 25 États membres de l’UE ou de pays voisins disposent désormais de formateurs nationaux à ce Programme. Les efforts de prévention sont également soutenus par Xchange, un registre européen en ligne répertoriant des actions de prévention évaluées.

Comme l’indique le rapport, presque tout ce qui possède des propriétés psychoactives peut apparaître sur le marché de la drogue, alors que les usagers ne sont potentiellement pas conscients de ce qu’ils consomment – Photo par Markus Spiske sur Unsplash
L’offre de services de réduction des risques et des dommages doit être renforcée
La consommation de drogues illicites cause toute une série de dommages aigus ou chroniques et pèse de façon non négligeable sur la part des morbidités au niveau mondial. Les réponses en matière de réduction des risques et des dommages, telles que le traitement par agonistes opioïdes et la distribution de matériel stérile pour les personnes injectrices de substances psychoactives, sont désormais largement considérées comme un acquis important pour l’offre de soins. Toutefois, la couverture et l’accès à ces types d’actions restent inadéquats dans certains États membres de l’UE par rapport aux besoins estimés. Certains pays ont également investi dans de nouveaux services, tels que les salles de consommation à moindre risque, les programmes d’utilisation de naloxone à domicile et les dispositifs d’analyse («testing») de drogues. La disponibilité de ces services reste plus limitée. En outre, le consensus entre les pays sur la question de savoir si ces mesures constituent des réponses appropriées est généralement moins net. Il est donc nécessaire de poursuivre les recherches et les rapports d’évaluation afin de renforcer la base d’éléments probants requise pour éclairer les débats politiques dans ce domaine.
Un soutien pluridisciplinaire est nécessaire pour traiter une cohorte vieillissante d’usagers d’opioïdes
Selon les estimations actuelles, un traitement par agonistes des opioïdes a été suivi par environ la moitié des personnes ayant une consommation problématique d’opioïdes dans l’Union européenne en 2021, soit environ 511 000 personnes (524 000 si l’on inclut la Norvège et la Turquie). ). Les données disponibles plaident en faveur d’un traitement par agonistes opioïdes, avec des résultats positifs sur le plan sanitaire et social, notamment une réduction du risque de mortalité. Cependant, plus de 60 % des usagers qui suivent un traitement par agonistes opioïdes sont aujourd’hui âgés de 40 ans ou plus, tandis que moins de 10 % ont moins de 30 ans. Cela signifie que les services doivent répondre à un ensemble plus complexe de besoins en matière de soins au sein d’une population qui devient de plus en plus vulnérable. Des voies d’orientation efficaces sont nécessaires vers des services plus génériques offrant un traitement des pathologies associées au vieillissement. Le traitement de ce groupe souvent très marginalisé doit également répondre à un ensemble complexe de problèmes liés non seulement à leur consommation de drogues, mais aussi à des problèmes de santé mentale, d’isolement social, d’emploi et de logement. Il convient donc de mettre davantage l’accent sur la mise en place de partenariats multi-institutionnels efficaces avec des services de santé génériques et de soutien social.