Mettre fin à la guerre contre la drogue dans les Amériques

La Coalition américaine sur la politique des drogues veut passer de la répression à des politiques fondées sur les droits humains, la justice sociale et la santé publique

51ème Assemblée de l'OEA

« L’appel pour une Amérique renouvelée doit nous inviter à passer résolument de la punition aux soins (…) avec des politiques en matière de drogues fondées sur le respect des droits, la justice sociale et la santé publique » – Image: capture d’écran de l’Organisation des Etats Américains

Par María Victoria Espada – Sous le slogan « Pour une Amérique renouvelée », l’Organisation des États américains (OEA) a tenu sa cinquante et unième session ordinaire de l’Assemblée générale du 10 au 12 novembre dans un format virtuel et sous l’égide du Guatemala. Fondée en 1948, l’OEA rassemble actuellement les 35 États indépendants des Amériques et constitue le principal forum gouvernemental politique, juridique et social du continent.

Des défis régionaux accentués par la pandémie

Dans son discours d’ouverture, le Secrétaire général de l’OEA, Luis Almagro, a souligné les défis auxquels la région est confrontée, encore accentués par la pandémie de Covid. Il s’agit notamment de l’inégalité, de la violence, de l’exclusion et des discriminations structurelles, du racisme, des conséquences du changement climatique, de l’insécurité alimentaire et de la migration forcée. En outre, le Secrétaire général a spécifiquement noté que « le trafic de drogues continue de menacer notre sécurité et notre stabilité ».

Multilatéralisme et coopération pour une relance à tous les niveaux

Face à ce scénario complexe, l’OEA propose garantir un accès équitable aux vaccins, de donner la priorité à la relance économique, de renforcer les systèmes démocratiques et de consolider le multilatéralisme et la coopération entre les pays de la région. De même, le Secrétaire Général a souligné que « le renouveau de notre continent [américain] nécessite la participation active et constante de la société civile dans les espaces démocratiques, et non pas seulement en tant que victimes de persécutions et de violences ».

Dialogue avec la société civile

À cet égard, et avant les sessions officielles de l’Assemblée générale, un dialogue ouvert a été organisé entre la société civile et d’autres acteurs sociaux, les États membres et le Secrétariat général de l’OEA. La plupart des coalitions permanentes accréditées et approuvées par l’OEA ont présenté leurs expériences et leurs préoccupations sur différentes questions, allant de la situation des femmes, des jeunes et des communautés indigènes et afro-descendantes à la liberté de conscience et d’expression, en passant par la préservation de l’espace civique, entre autres.

Le rôle de la Coalition américaine sur la politique des drogues (CAPD)

La CAPD a également participé à ce dialogue, représentée par son coordinateur, Pablo Cymerman, de Intercambios Asociación Civil. La CAPD est composée de vingt-six organisations de la société civile basées en Argentine, au Brésil, au Canada, au Chili, en Colombie, au Costa Rica, aux Etats-Unis, au Mexique, à Porto Rico et en République dominicaine, ainsi que d’autres organisations au niveau mondial, comme Dianova International.

Depuis 2018, le CAPD travaille sur les problèmes liés à l’utilisation, à la production et à la commercialisation des drogues considérées comme illicites. Elle vise également à favoriser un débat social éclairé afin de promouvoir des politiques non punitives, fondées sur des preuves scientifiques et qui répondent efficacement aux différents problèmes liés aux drogues. Le CAPD fournit des informations aux gouvernements de la région afin qu’ils puissent modifier les politiques en matière de drogues et ainsi réduire les dommages causés par les réglementations actuelles.

Mettre fin à la « guerre contre la drogue » et passer de la punition aux soins

Cinquante ans après que le président Richard Nixon a déclaré la guerre aux drogues et que les politiques répressives se sont répandues dans toutes les Amériques, la CAPD a souligné que « l’appel pour une Amérique renouvelée doit nous inviter à passer résolument de la punition aux soins (…) avec des politiques en matière de drogues fondées sur le respect des droits, la justice sociale et la santé publique ». Ainsi, la CAPD a exhorté les États membres de l’OEA dans sa déclaration à :

  • Modifier les politiques répressives en matière de drogues, en évitant la criminalisation des personnes qui consomment des drogues et en recherchant des alternatives à l’incarcération.
  • S’attaquer aux problèmes liés à la consommation de drogues et aux addictions dans une perspective de santé publique, en garantissant l’accès universel aux services de prévention, de traitement, de réadaptation, de réduction des risques et d’intégration sociale.
  • Assurer la qualité des services offerts, en prévoyant des ressources humaines et financières suffisantes, dans le cadre d’une approche scientifique et sexospécifique conforme aux principes éthiques.
  • Faciliter l’accès sans restriction aux soins de santé pour les personnes privées de liberté ayant une consommation problématique de drogues, en offrant des services similaires à ceux disponibles dans leur communauté.
  • Éviter les politiques qui mettent davantage en danger la vie des communautés indigènes, paysannes et afro-descendantes qui cultivent des plantes illicites, en établissant de nouveaux indicateurs de succès des politiques sur les drogues.
  • Garantir le respect des droits humains dans toutes les mesures prises, y compris les Directives internationales sur les droits humains et la politique en matière de drogues.
  • Maintenir des espaces de dialogue avec la société civile au sein de la Commission interaméricaine de lutte contre l’abus des drogues (CICAD) et de la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH), dans le respect de la cohérence du système interaméricain.

Avec cette déclaration, comme les années précédentes, les organisations et réseaux membres de la CAPD ont jeté les bases visant à favoriser le dialogue avec les États membres et les institutions de l’OEA et élargir le débat nécessaire sur la politique des drogues dans la région.