Le développement est durable lorsqu’il est inclusif

Il faut faire en sorte que les services de soins et les mécanismes de protections sociales offrent un accès et une couverture universels et équitables

CSW63

L’amélioration des infrastructures et des services publics est cruciale pour renforcer la sécurité des femmes et des fille

Par M. Victoria Espada – La Commission de la condition de la femme s’est réunie en mars dernier au siège des Nations Unies, à New York, pour sa soixante-troisième session (CSW63 à cause de ses initiales en anglais). Le sujet majeur de la discussion tourna autour des « systèmes de protection sociale, de l’accès au services publiques et aux infrastructures durables pour l’égalité des genres et l’autonomisation des femmes et des filles ».

Cette proposition fut déjà identifiée précédemment, lors de réunions de la Commission du développement social des Nations Unies (CSocD57) devant le constat précisant que seulement 20 % de la population mondiale possède une couverture adéquate en termes de protection sociale et que plus de la moitié de la population ne jouit d’aucun type de couverture, selon des données récentes de l’Organisation Internationale du Travail (OIT). Lorsque les droits aux services de soins sont étroitement liés à l’emploi, l’insécurité économique des femmes et la féminisation de la pauvreté se perpétuent alors avec un impact intergénérationnel flagrant, puisque les femmes ont plus de chances de travailler dans le secteur informel de l’économie, surtout dans les pays en développement.

De même, l’amélioration des infrastructures et des services publics est cruciale pour renforcer la sécurité des femmes et des filles. En outre, l’intégration d’une perspective sexospécifique dans la planification des stratégies de développements urbains et ruraux, en incluant le logement, les transports, les espaces publiques et l’assainissement, entre autres, incite de façon positive à la construction de sociétés plus inclusives tout en réduisant l’exposition des femmes et des filles à la violence, aux agressions et au harcèlement.

Pour que les systèmes de protection sociale, les services publics et les politiques d’infrastructures deviennent complémentaires et se renforcent mutuellement, il est nécessaire d’adopter une approche coordonnée et intégrée à la politique, ainsi qu’une mobilisation accrue des moyens financiers nationaux et internationaux. Ces dernières années ont été témoins de restrictions budgétaires et de mesures d’austérité, ainsi que de lois et de politiques discriminatoires, aggravant ainsi les inégalités entre les sexes et faisant obstacle à une croissance inclusive. De la même façon, les problèmes actuels tels que les migrations, le changement climatique, les conflits armés et les situations postérieures à un conflit accroissent encore plus la vulnérabilité, l’insécurité et la pauvreté des femmes et des filles, en pouvant inverser, dans certains cas, les effets des progrès accomplis.

Les participants aux sessions parallèles de la Commission de la condition de la femme, étant essentiellement des représentants d’organisations non gouvernementales (ONG) et de la société civile, ont dévoilé également des zones d’ombres et de lumières sur le chemin menant à l’égalité des sexes, notamment quant aux salaires et aux revenus, aux accès aux ressources économiques et productives, à la participation des femmes au marché du travail, aux conditions de travail et à la répartition de l’accès aux soins médicaux entre les sexes et au sujet du travail domestique non rémunéré. En ce sens, la nécessité de rendre des comptes suivant la sexospécificité et le traitement de données ventilées par sexe, revenu, âge et d’autres caractéristiques furent considérées comme nécessaires afin de faciliter un meilleur suivi des résultats des politiques et des programmes et d’identifier les inégalités à éradiquer pour que « personne ne soit laissé pour compte ».

Le harcèlement sexuel dont les femmes et les filles sont victimes, tant sur leur lieu de travail que dans leur école, qu’il ait lieu dans des espaces publiques ou privés, occupa également une place importante dans les discussions de cette année. Les facteurs tels que l’inégalité historique et structurelle des rapports de force entre les femmes et les hommes, les normes sociales négatives et les stéréotypes sexistes sont des éléments qui alimentent un environnement hostile et portent atteinte aux égalités des chances entre les sexes et à la pleine jouissance de leurs droits. En politique, par exemple, le harcèlement sexuel et l’intimidation aggravent la sous-représentation des femmes, réduisent leur contribution au processus politique et affaiblissent la démocratie. Ainsi, dans une étude réalisée par l’Union Interparlementaire et le Conseil de l’Europe, il fut révélé qu’un quart des femmes parlementaires interrogées avaient déjà été l’objet de harcèlements sexuels perpétrés par des collègues parlementaires masculins, tant dans leur propre parti politique que dans un parti adverse.

Le message unanime des divers débats du CSW63 a été porté haut et fort : dans un an, si l’égalité des sexes, au sens le plus large, est ignorée, il ne pourra y avoir de progrès dans le cadre de la réalisation des buts fixés par les Objectifs de Développement Durable (ODD) de l’Agenda 2030. Pour que le développement soit durable, les droits de l’homme se doivent d’être reconnus, protégés et respectés. Personne ne peut, ni ne doit être laissé pour compte.