Dianova participe à une consultation d’experts sur la prévention des drogues organisée par l’association Proyecto Hombre à Oviedo (Espagne)
Le 9 juin dernier, une vingtaine d’experts aux plan national et international se sont réunis dans la ville asturienne d’Oviedo pour discuter des stratégies de prévention des dépendances (drogues et autres conduites addictives), aborder les actuels défis en la matière, et, enfin, présenter les premiers résultats d’un programme de prévention universelle mis en œuvre par l’association Proyecto Hombre. L’événement était organisé par l’association Proyecto Hombre et la fondation CESPA – Proyecto Hombre Asturias, avec le soutien de la municipalité d’Oviedo.
Les experts étaient issus d’horizons très divers: société civile, monde universitaire et pouvoirs publics à tous les niveaux. Étaient également présents le Dr. Wadih Maalouf, coordinateur mondial pour la prévention à l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (UNODC), Alfredo Canteli, maire d’Oviedo, ainsi que la représentante permanente auprès des Nations unies à Vienne, Esther Monterrubio.
Dianova était représentée par Lucía Goberna, rapporteuse de la session, qui a présenté les conclusions à la fin de l’événement.
Suivre et évaluer les programmes
La prévention est une science. A ce titre, elle doit être suivie et évaluée. Prévenir, c’est aller bien au-delà de la seule sensibilisation vis-à-vis d’un problème donné. S’il est important de sensibiliser le public, le travail de prévention a beaucoup plus d’implications. Evaluer les interventions de prévention est essentiel si l’on veut éviter leurs possibles conséquences iatrogènes – c’est-à-dire les dommages involontaires susceptibles d’y être associés – et pour en vérifier l’efficacité. Malheureusement, il existe encore des programmes de prévention qui non seulement ne sont pas fondés sur des données probantes, mais qui peuvent être contre-productifs. Il est temps de changer la culture de la prévention.
Élargir le champ d’application des systèmes de prévention
Pour être efficace, toute démarche de prévention doit tenir compte d’une perspective holistique incluant les déterminants sociaux de la santé et les variables du bien-être des jeunes (éducation, emploi, possibilités d’émancipation, santé, etc.)
Les programmes de prévention doivent viser l’autonomisation des personnes en travaillant les aspects du développement émotionnel, des compétences sociales et de communication, etc. à chaque étape de leur vie.
Il faut en effet garder à l’esprit que, même si la prévention est généralement associée à la jeunesse, elle peut et doit aussi être mise en œuvre tout au long de la vie, par exemple via des interventions en milieu de travail.
Il faudrait aussi mobiliser davantage les différents secteurs associés à la prévention et à la promotion de modes de vie plus sains: les jeunes, les familles, la communauté en général et le monde universitaire. Il faut travailler ensemble avec le même objectif en tête.
Mieux gérer la prévention
Une question reste en suspens: celle du financement complexe des interventions. Cet aspect a été sérieusement négligé en Espagne en raison de la crise financière et de la pandémie. De nombreuses organisations du troisième secteur dépendent encore fortement de l’administration publique, ce qui les fragilise. Il faut assurer la viabilité financière des organisations qui travaillent dans ce domaine.
Ne pas investir dans la prévention revient à s’imposer un coût économique important, en termes de services de santé, d’échec scolaire et autres conséquences non seulement pour la personne, mais aussi pour toute la communauté. Selon Jesús Morán, représentant du Plan national espagnol sur les drogues, il est temps de repositionner la prévention et de lui donner une continuité au niveau de l’État.
Mieux gérer la prévention passe sans doute par la professionnalisation du secteur à tous les niveaux, depuis les décideurs jusqu’aux maîtres d’œuvre. Il faut aussi veiller sur les professionnel·les concernés et éviter qu’ils ou elles ne s’épuisent.
La prévention dans les pays à revenu faible ou intermédiaire
En matière de prévention, les recherches effectuées sont rarement fondées sur les réalités des pays à revenu faible ou intermédiaire. Les interventions y sont donc moins pertinentes ou efficaces. Il est temps de tourner les regards ailleurs que vers les pays occidentaux.
D’autre part, il ne faut pas oublier que le travail de prévention est plus nécessaire encore, justement, dans les pays où les structures socio-sanitaires disposent de moins de ressources. Dans ces contextes, comme l’a souligné la secrétaire générale de la Fédération mondiale contre les drogues (WFAD), Regina Mattsson, le travail de prévention s’avère accessible et peu coûteux.
Et le travail continue
De nombreuses questions ont été abordées, mais il faut souligner le travail qu’il reste à faire en termes de prévention des dépendances non liées aux substances (et l’importance de faire progresser l’analyse de la perspective de genre dans ce domaine), de prévention de la pornographie chez les jeunes, de prévention tout au long de la vie et d’inclusion de groupes cibles dans les programmes de prévention.
Le travail de l’association Proyecto Hombre a enfin été présenté, avec les données concernant la mise en œuvre et l’évaluation du programme de prévention universelle « Juego de Llaves » dans les écoles. Le cadre de la collaboration entre le gouvernement régional des Asturies et le conseil municipal d’Oviedo, qui sont des références majeures dans le domaine de la prévention, a également été discuté.
Cette rencontre s’est révélée très enrichissante et a permis non seulement de mettre les défis de la prévention sur la table , mais aussi la nécessité de créer une masse critique et de renforcer les exigences dans le domaine. Un grand merci aux équipes de l’Asociación Proyecto Hombre et du CESPA pour leur hospitalité.
Accédez à l’enregistrement ici : partie I et partie II.