Journée internationale contre l’abus des drogues

Pour marquer la Journée internationale contre l’abus de drogues, examinons l’impact du Covid-19 sur les services d’addiction et les personnes qui consomment des drogues

 Journée internationale contre l'abus et le traffic illicite de drogues

Malgré des circonstances difficiles, nos professionnels ont accompli leur tâche avec intégrité, en continuant d’apporter conseils et soutien aux personnes les plus vulnérables. – Image: Journée internationale contre l’abus et le traffic illicite de drogues

Par Lucía Goberna – Cette année, la célébration de la Journée internationale contre l’abus et le trafic illicite de drogues, le 26 juin, est sans aucun doute particulière. Une journée que nous n’oublierons pas.

Au cours des quatre derniers mois, la pandémie de Covid-19 a totalement transformé notre quotidien. Jamais nous n’aurions pu prévoir une situation à ce point surréaliste. Le Covid-19 continue de se répandre dans certains pays. D’autres commencent à peine à s’en remettre, tout en redoutant une deuxième vague. Et chacun essaie désormais de vivre dans ce nouveau monde de distanciation physique, y compris les personnes qui consomment des drogues.

Défis pour les services dédiés aux addictions

Nous avons pris le temps d’étudier l’impact de la pandémie sur les services de traitement des dépendances et sur les personnes qui les utilisent, en particulier en Europe.

Comme le souligne une étude[1] de l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT), on a constaté une baisse générale marquée de l’offre de services de traitement des addictions et du nombre de personnes qui cherchent de l’aide en Europe.

Les services de traitement des addictions ont été confrontés à d’énormes défis dans le contexte de la pandémie de Covid-19. Ils ont dû, entre autres, se procurer suffisamment d’équipements de protection individuelle pour leur personnel, gérer leurs patients potentiellement infectés, répondre aux demandes croissantes de traitements de substitution et faire face à une pénurie de personnel.

Les professionnels des addictions ont constaté que leur travail devenait plus difficile alors même que les services de prévention, de traitement, de réintégration et de réduction des risques sont plus que jamais nécessaires.

Les troubles liés à l’usage de substances psychoactives mettent la vie de millions de personnes en danger. Pourtant, de nombreux services de traitement des addictions ont dû limiter la portée de leurs services, voire fermer certains programmes, en raison des contraintes strictes qu’ils ont dû imposer.

Des réponses innovantes et flexibles

Ces services se sont toutefois rapidement adaptés à la situation, en apportant des réponses innovantes et flexibles. Par exemple, lorsque cela a été possible, les contacts en face à face ont été largement remplacés par la télémédecine (par téléphone ou par vidéo).

Comme le montre l’étude de l’OEDT, les fournisseurs de traitements de substitution aux opiacés (TSO) ont dû agir rapidement et modifier leur façon d’opérer. Ils l’ont fait à la fois pour garantir l’accès aux médicaments aux personnes déjà en traitement et pour répondre aux nouvelles demandes. Par exemple, des services mobiles de TSO et de nouveaux programmes à bas seuil ont été déployés dans plusieurs pays afin de garantir l’accès des personnes les plus vulnérables au traitement. En outre, certains pays ont assoupli la réglementation relative aux TSO à emporter, afin de réduire le nombre de visites chez les médecins et les services prescripteurs.

Malgré la baisse générale de la demande d’aide et de la disponibilité des services, les experts en réduction des risques ont signalé une augmentation de la demande parmi leur patientèle. Deux raisons principales expliquent ce phénomène. D’une part l’augmentation des demandes de soutien social (logement, nourriture, hygiène, revenus) venant de populations particulièrement vulnérables. Et d’autre part, l’augmentation des demandes pour des services de TSO à bas seuil due à une pénurie d’opiacés sur le marché des drogues.

Selon le directeur de l’OEDT, Alexis Goosdeel[2], l’innovation et la flexibilité des services de prise en charge des addictions a été un élément « à la fois très important et positif » . Il faut enfin souligner que de telles expériences seront probablement pérennisées une fois que l’urgence du Covid-19 aura pris fin.

Tendances hors Europe

Si l’étude de l’OEDT porte sur l’Europe, nous avons constaté des tendances similaires dans d’autres régions. Aux Etats-Unis par exemple, le Addiction Policy Forum a mené une étude pilote pour mieux comprendre l’impact du Covid-19 sur les personnes souffrant de troubles liés à la consommation de substances.

Les résultats montrent que plus d’un répondant sur trois (34%, sur 1.079 personnes interrogées) a signalé des changements ou des perturbations dans l’accès aux services de traitement ou de soutien au rétablissement, tandis que 14% d’entre eux n’ont pas pu recevoir les services dont ils avaient besoin.

La situation dans les centres de Dianova

En tant que prestataire de services, Dianova a fait l’expérience de ces défis sur le terrain. Dans de nombreux pays où notre réseau met en œuvre ses activités, les autorités n’ont pu apporter qu’un soutien limité aux services de prise en charge des addictions.

 

Parmi ces mesures, il faut citer la suspension des nouvelles admissions (ou en limitant l’accès aux patients dépistés ou bien placés en quarantaine), une réduction des activités de groupe réalisées au sein des structures, de même que, lorsque c’était possible, le traitement et suivi des bénéficiaires par téléphone ou vidéoconférence.

Malgré ces circonstances difficiles, nos professionnels ont accompli leur tâche avec intégrité, en continuant d’apporter conseils et soutien aux personnes les plus vulnérables.

Les services d’addiction sont essentiels

Le 26 juin est l’occasion pour nous d’intervenir et d’exiger que l’addiction soit considérée sur le même plan que les autres maladies. La prévention et le traitement des troubles liés à la dépendance sont essentiels et les services de prise en charge des addictions doivent donc être financés de manière adéquate !

Si une autre crise de cette nature devait survenir, les services dédiés aux addictions ne devraient plus être les grands oubliés du système de santé publique. Les troubles liés à l’usage de substances et les autres addictions sont une question de santé publique, c’est pourquoi les services qui leur sont dédiés doivent être considérés comme des services essentiels.

Aujourd’hui, plus que jamais, rejoignez la campagne #AddictionServicesAreEssential et faites passer le message !


 

[1] Impact of Covid-19 on drug services and help-seeking in Europe – EMCDDA trendspotter briefing, May 2020

[2] Le Directeur del’OEDT, Alexis Goosdeel s’adresse aux membres du Comité pour les libertés civiles, justice et affaires intérieures du Parlement Européen à propos de l’impact du Covid sur l’usage de drogues et les services associés en Europe: lien vers la video (à partir de 9:39’)