Déclaration de Dianova International à la CND64

CND64

La 64e session de la Commission des stupéfiants se tiendra du 12 au 16 avril 2021, dans un format hybride (sessions en ligne et en personne à Vienne).

Si le statut légal du cannabis fait l’objet de beaucoup d’attention au sein des organisations internationales, il ne doit pas faire oublier une question importante: la nécessité de renforcer et d’améliorer les services de prévention et de traitement des troubles liés à l’usage de cette substance face à l’augmentation importante des demandes de traitement.

En quelques années seulement, les marchés du cannabis ont connu une évolution sans précédent qui s’est traduite par une augmentation des demandes de traitement pour des troubles de l’usage du cannabis en tant que première substance motivant la demande. Cette augmentation a également eu des répercussions importantes sur les modes de consommation (polyconsommations, usages chroniques lourds, usages de cannabinoïdes synthétiques), avec pour conséquence des problèmes associés aux plans physique, mental et social à la fois plus nombreux et plus graves. C’est pourquoi, indépendamment des débats sur la meilleure façon de contrôler l’usage de cette drogue par des voies légales, nous estimons qu’il est urgent de répondre au mieux aux besoins des personnes pour qui la consommation de cannabis devient un réel problème.

Améliorer le traitement et la prévention

Comme on le sait, ces problèmes sont d’autant plus sérieux que la consommation commence tôt, pour évoluer ensuite vers un usage chronique et à long terme. Une réponse sanitaire cohérente doit donc se baser sur la prévention des premières consommation, en particulier chez les plus jeunes ; la prévention du passage vers la consommation chronique ; la réduction des méfaits liés aux consommations lourdes et chroniques, et enfin ; les soins apportés aux personnes faisant un usage problématique.

En tant que prestataire de services de traitement des addictions et acteur impliqué dans le suivi des politiques internationales en matière de drogues, Dianova s’est attachée à mieux comprendre les enjeux liés à l’évolution des législations en matière de cannabis. Pour cela, notre organisation a mené à bien une étude sur la régulation et la légalisation de l’usage thérapeutique et récréatif du cannabis et sur la dépendance et les risques sociosanitaires associés. Cette étude a notamment servi de base pour la mise à jour du positionnement de l’organisation en matière de politiques des drogues en général et vis-à-vis du cannabis en particulier. Cette étude soulignait dans ces conclusions qu’il est nécessaire d’élaborer et de mettre en œuvre des programmes mieux adaptés aux besoins des personnes, ce qui souvent n’est pas le cas actuellement.

C’est pourquoi, Dianova a organisé une série de séminaires en ligne sur la manière d’améliorer ces programmes de prévention et de traitement afin de recueillir une information de première main auprès des acteurs concernés. La première de ces réunions s’est déroulée avec plusieurs membres du réseau Dianova, la seconde avec des membres de la Fédération européenne des communautés thérapeutiques (EFTC) et une troisième est prévue lors d’un événement parallèle qui doit se tenir en marge de la Commission des Stupéfiants des Nations Unies le 15 avril prochain (voir flyer). L’expérience que nous avons tirée de l’organisation de nos séminaires a démontré qu’ils étaient extrêmement précieux pour mieux comprendre les besoins du secteur et partager des pratiques efficaces.

En ce qui concerne la prévention (primaire et secondaire), nous demandons à la Commission d’insister sur la mise en œuvre de pratiques scientifiquement validées, à l’exemple des programmes scolaires visant à corriger les fausses croyances des plus jeunes vis-à-vis du cannabis, affiner leur perception des risques associés et développer leurs compétences et leurs habiletés sociales et en termes d’auto-soins. Nous estimons aussi qu’il faut insister encore sur le manque d’efficacité des approches visant simplement à informer la population cible des risques associés à l’usage de cannabis.

Du côté du traitement, nous estimons que les services dédiés doivent prendre davantage en compte les diversités d’usage selon les profils – par exemple l’utilisation du cannabis comme anesthésiant – une diversité qui n’est pas toujours prise en compte dans l’intervention.

De même, nous observons que nombre de programmes spécialisés sont en priorité destinés à un public adolescent et ne sont pas suffisamment adaptés aux besoins des jeunes adultes et des adultes. C’est pourquoi nous estimons indispensable de renforcer l’offre de services destinée à cette population.

Enfin, sur la base de notre expérience en matière de traitement, nous estimons essentiel de privilégier les choix des personnes concernées en matière de programmes et de services, et nous soulignons la nécessité de :

  • Prendre en compte les différents modèles de consommation de cannabis et le rôle joué par cette consommation ;
  • Veiller à une prise en charge adéquate des troubles mentaux concomitants, notamment grâce aux partenariats avec des services ambulatoires spécialisés ;
  • Associer les familles à l’intervention, et pour les plus jeunes, s’efforcer d’améliorer leurs habiletés parentales ;
  • Prêter attention aux polyconsommations, voire aux polyaddictions : nous avons notamment constaté l’aggravation des problèmes lorsque la consommation de cannabis est associée à une problématique de jeu compulsif ;
  • En cas de consommation, préconiser une consommation responsable, notamment auprès de la population adulte présentant ou susceptible de présenter des problèmes de santé mentale ;

 

Enfin, nous demandons à la Commission de Stupéfiants et à ses membres d’élargir le débat sur le cannabis au-delà de ses aspects juridiques afin de répondre à ces besoins réels. Pour cela il est indispensable de promouvoir la recherche et les partenariats afin d’améliorer et adapter les programmes de prévention et de traitement dont l’efficacité a été scientifiquement démontrée, tout en assurant la mise en œuvre et le financement adéquats de ces services.


 

Sources (documents et sites web)

Étude sur la régulation et la légalisation de l’usage thérapeutique et récréatif du cannabis et sur la dépendance et les risques sociosanitaires associés – Dianova International (2020)

Positionnement sur les addictions et les politiques en matière de cannabis – Dianova International (2021)

Disease Resistant, GMO Cannabis – Cannabis Tech

Prévenir et traiter les usages problématiques de cannabis – webinaire, Dianova International